[CAS CLIENT] MSF : Former au diagnostic de la malnutrition

Médecins sans frontières (MSF) est une organisation non gouvernementale (ONG) à visée humanitaire fondée en 1971 à Paris. Elle porte assistance à des populations dont la vie ou la santé sont menacées, en cas de conflits armés, d’épidémies, de pandémies, de catastrophes naturelles ou d’exclusion des soins. Aujourd’hui, l’ONG est active dans plus de 80 pays avec plus de 75.000 personnes sur le terrain. Dokeos LMS a accompagné MSF dans la digitalisation de ses formations.

45 millions d’enfants en-dessous de cinq ans sont trop minces pour leur taille. Principalement en Afrique et en Asie. Membre de MSF, Brigitte est infirmière spécialisée dans les pathologies liées à la malnutrition infantile. Après avoir passé cinq ans sur le terrain, elle a conçu une formation pour tous les infirmiers d’Europe occidentale, candidats pour le poste de gestionnaire d’un dispensaire en Afrique Sub-saharienne.

Le processus initial de cette formation proposée par MSF exigeait comme pré-requis, une formation en médecine tropicale. Ensuite, trois semaines de cours intensifs en salle, à Bruxelles, suivies d’un examen, fournissent aux postulants les compétences nécessaires pour gérer un dispensaire spécialisé en malnutrition infantile.

Le projet de formation

Brigitte a alors proposé à son directeur de transposer son cours en e-learning, épuisée par ce rythme de formations en continu et frustrée de n’avoir plus le temps de se former et de soigner sur le terrain. Celui-ci a approuvé à condition que le projet soit rentable dans les 6 mois.

Défi accepté par la petite équipe porteuse du projet composée de Brigitte, Françoise, engagée pour mener cette opération et un conseiller Dokeos.

L’analyse du projet révèle plusieurs éléments intéressants :

  1.  Le public cible, des infirmiers spécialisés en maladies tropicales, a déjà des notions sur la malnutrition. L’objectif est d’approfondir ses connaissances.
  2. Les compétences à transmettre sont bien délimitées : il s’agit de la capacité à diagnostiquer et à identifier les différents types de malnutrition chez un patient de moins de 8 ans ainsi qu’à déterminer le traitement à appliquer.
  3. MSF dispose des contenus de formation, ainsi que d’une grande bibliothèque de photos et de vidéos réalisées par le département de communication lors des campagnes de récolte de don.

Le diagnostic de malnutrition

Le diagnostic de malnutrition s’appuie sur une série de mesure standardisées telles que : mesure du périmètre crânien, pesée, inspection oculaire et anamnèse. Il classe les sujets en fonction du type de malnutrition afin de définir un plan de traitement et de suivi.

Digitalisation

Pour respecter les contraintes de temps, de budget et d’efficacité pédagogique, l’équipe décide d’articuler le cours autour de six cas réels, représentatifs des principales formes de malnutrition chez l’enfant : Aïcha, Hana Ismaël, Kadir, Nadjat et Smaïn, tous entre 2 ans et 7 ans. Pour chacun d’eux, on se base sur les données réelles conservées au cours de leur traitement au dispensaire : symptômes à leur arrivée, mesures, taille, poids, âge, résultats d’examens, traitement avec la posologie exacte et évolution de l’état de santé.

L’acquisition progressive des compétences consiste pour l’infirmier en partant de ses connaissances de bases en malnutrition à répondre à un questionnaire à choix multiples sur chacun des enfants.

Par exemple, à partir d’une photo de Smaïn à 3 ans, dans les bras de sa maman lors de son arrivée au dispensaire, on fournit les informations suivantes : Smaïn  a cessé de s’alimenter depuis 2 jours, il est faible et son front est chaud.

La question étant: quels sont les trois premières mesures et examens que vous allez réaliser ?

  1. Poids
  2. Taille
  3. Température
  4. Pouls
  5. Tension
  6. Circonférence crânienne
  7. Examen respiratoire
  8. Fond de l’oeil
  9. Examen de la peau

L’infirmier tâche de se remémorer ses cours sur la malnutrition et opte pour sélectionner trois propositions de réponses. L’écran suivant lui montre la réponse avec sa justification et une explication. Celle-ci est illustrée par des photos, des schémas ou une vidéo.

Une trentaine de questions sont proposées pour chacun des six cas. L’objectif est de former l’infirmier aux éléments auxquels il doit être attentif pour poser un diagnostic et l’affiner, l’ajuster voire le revoir, tout au long de l’évolution de l’état du patient, jusqu’à sa sortie du dispensaire et au monitoring dans les 6 mois qui suivent.
Après avoir répondu aux questions d’apprentissage sur les six cas, les infirmiers ont acquis des réflexes de raisonnement et de diagnostic. Ils sont capables de prescrire les traitements et de les ajuster en fonction des résultats des examens et mesures réalisés. Au total, ils ont accompli chacun entre 80 et 110 heures de formation

Des résultats probants

Le succès de ce projet a dépassé les attentes ! Il n’a fallu que trois mois à cette équipe pour construire le scénario, rassembler les photos et vidéos et implémenter le tout sur la plateforme. Mais dès le lancement du projet avec un trentaine d’infirmiers, l’équipe savait qu’elle avait réussi son pari :

  • Les enquêtes de satisfaction étaient enthousiastes sur l’efficacité du scénario pédagogique.
  • La somme investie par MSF pour construire la formation serait rapidement amortie, d’une part par le prix payé par les infirmiers participant au e-learning et d’autre part par la suppression du coût de la formation en salle : location de la salle, billets d’avion et hébergement des candidats, sans compter le salaire de Brigitte qui allait pouvoir se consacrer à d’autres fonctions dans l’organisation.

Formation MSF : quels enseignements ?

Cette histoire se passe en 2008. Ce fut le premier cas d’accompagnement de Dokeos en digitalisation. Depuis, il a fait école et a inspiré de nombreuses organisations car il s’appuie sur trois leviers importants de la réussite des formations en e-learning :

  1. Les questions d’apprentissage et feed-backs formatifs : elles captent l’attention des apprenants, stimulent leur concentration et les gardent actifs tout au long de leur apprentissage.
  2. Les cas réels permettant des mises en situation semblables aux cas que les infirmiers allaient rencontrer.
  3. Une bibliothèque d’illustrations respectant la charte graphique de l’organisation qui assure l’harmonie visuelle des contenus et permet aux apprenants de rester focalisés sur les compétences à acquérir.

Depuis, le nombre de formations en salle qui ont fait l’objet d’ateliers de digitalisation augmente chaque année et l’équipe de consultants capables d’assurer cet accompagnement aussi. Il sont une dizaine aujourd’hui.
Ils ont pour mission de transmettre au client les bases des bonnes pratiques du e-learning et de mettre en œuvre cet apprentissage à travers la transformation d’une des formations en salle du client en une formation en ligne et de l’implémenter sur le portail. Grâce à leur analyse, ils proposent des scénarios personnalisés, adaptés au contexte de travail du public cible.

Ensuite, le client bénéficie, s’il le souhaite de séances de mentoring au cours desquelles un consultant lui fait un retour sur les nouvelles digitalisations de formation que le client a réalisées. Le mentoring porte sur 3 aspects de la formation :

  1.  La cohérence pédagogique entre les compétences à transférer d’une part et les activités d’apprentissages et d’évaluation d’autre part
  2. La pertinence des fonctionnalités et outils utilisés pour atteindre l’objectif
  3. L’homogénéité graphique des illustrations, des couleurs et de l’affichage du contenu.

Méthode BASIC®

Des compétences aussi pointues que la capacité à poser un diagnostic peuvent s’apprendre en e-learning s’il y a une réelle cohérence entre les objectifs de la formation en termes de compétences à acquérir, les activités d’entraînement progressif à l’acquisition de ces compétences et les évaluations. C’est ce qu’a expérimenté Médecins Sans Frontières et ses infirmiers aspirants spécialistes en malnutrition infantile.
Ce premier cas a fondé la méthodologie BASIC® des formations en ligne optimisées :

 

  1. Bénéfice : Partir du bénéfice recherché par l’organisation. Pour MSF, une réduction des coûts et une pédagogie efficace.                                         
  2. Activités :  Transformer les contenus en activités d’apprentissage, découpées en niveaux progressifs de difficulté. Ici, les infirmiers exercent leur observation à travers les photos et les vidéos et raisonnent à partir des informations qu’ils ont pour poser des hypothèses de diagnostic.
  3. Simulation : Imiter le contexte de travail dans lequel les compétences seront mises en œuvre. La formation de MSF se focalise sur les 6 pathologies représentatives de la malnutrition à travers 6 cas de patients réels. Au cours de la formation, les variations de symptômes sont expliquées.
  4. Illustration :  Une charte graphique minimaliste (un logo, une police de caractère, une ou deux couleur(s), une seule galerie d’images ou de schémas) valorisant les contenus de la formation. Ici, tous les contenus étaient déjà alignés à la charte graphique de MSF. 
  5. Certification :  Des évaluations qui mesurent les compétences exercées dans les activités. L’évaluation finale de la formation sur la malnutrition propose des cas de patients semblables aux cas étudiés. On vérifie que l’infirmier a acquis le raisonnement d’élimination des hypothèses par l’observation des symptômes, la mesure des paramètres pertinents et les examens complémentaires.

La magie de ces 5 critères, c’est qu’ils permettent de créer des formations en ligne pour tous les métiers et tous les types de compétences : qu’il s’agisse de réparer des moteurs d’avion, de soigner les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de vendre des montres de luxe, une partie au moins de ces compétences peut être montrée, expliquée et exercée en ligne.

 
 

Remerciements & Licence

Pascale Delchevalerie, Référent nutrition chez Médecins Sans Frontières.
Annick Filot, Learning Graphic Designer chez Médecins Sans Frontières.

Auteure

 

Christine Amory est juriste diplômée de l’Université de Louvain et spécialiste de la législation pharmaceutique européenne.
Elle a participé, dès 2008, à la mise au point de la méthode BASIC® comme outil de construction d’une stratégie de formation digitale pertinente au sein des organisations.
Christine pilote aujourd’hui le pôle Conseil de la société Dokeos.

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